Arrêtons-nous aujourd'hui sur un objet unique au monde : le gouvernail de direction du Couzinet 70 Arc en Ciel. Cette relique est l'ultime élément restant de ce fabuleux trimoteur destiné aux traversées transatlantiques.
L'Arc en Ciel fut conçu par René Couzinet, un ingénieur aéronautique qui entra à l'Ecole Nationale Supérieure d'Arts et Métiers d'Angers en 1921. Il en sort diplômé et intègre l’École Supérieure de l'Aéronautique. Le jeune René fourmille d'idées novatrices, trop peut-être, au regard de l'accueil qui leur est réservé par la profession... Loin de se décourager, Couzinet conçoit quatre avions, tous dessinés sur le même modèle, tous trimoteurs.
Les avions Couzinet sont très en avance sur leur temps. Ils se démarquent de leurs concurrents en tant qu'appareils terrestres, c'est-à-dire dotés de roues à la place des flotteurs. Au début des années 1930, seuls les hydravions ont les faveurs d'Air France. Le Couzinet 70 est le plus élaboré des avions de la série ; le plus grand aussi.
La dérive du Couzinet 70 et la maquette de l'avion (Photo A. Dury/EAP - Pôle communication)
Le 16 janvier 1933, le grand trimoteur est piloté par Jean Mermoz, assisté de Couzinet lui-même. L'équipage s'élance à la conquête de l'Atlantique Sud, de Saint-Louis du Sénégal vers Natal, au Brésil. Le vol est un succès, après 14h30 passés dans les airs. A l'issue une tournée triomphale en Amérique latine, Couzinet et son avion éponyme rentrent en France. Las, le regard des techniciens métropolitains n'a pas changé et l'avion reste vilipendé en dépit de son exploit. La suite de la vie et la carrière de René Couzinet virent à la tragédie. L'homme est marginalisé, il quitte la France pour le Brésil et à son retour en 1944, tout le monde lui a tourné le dos. Son grand trimoteur a été détruit pendant la guerre et finalement, Couzinet se supprime.
Du Couzinet 70, seul le gouvernail de direction subsistera. Il terminera sa course la où tout avait commencé : à l’École des Arts & Métiers d'Angers. Trônant dans une salle de classe, l'objet mythique avait finit par faire tapisserie... Lorsque Espace Air Passion s'est vu proposer cette dérive historique, quelle fut notre surprise de découvrir sur ses deux faces, inscrits au crayon, les autographes de tous les acteurs ayant concouru à l'épopée du dernier des Arc en Ciel : Mermoz et Couzinet bien sûr, mais aussi Jean Moulin, Pierre Cot, respectivement chef de cabinet et ministre de l'Air. A ses signatures prestigieuses s'ajoute une légende, Antoine de Saint-Exupéry, venu encourager ses amis.
Vue du gouvernail du Couzinet 70. On distingue les autographes sur la partie blanche
(Photo Y. Le Mao/EAP - Pôle communication)